Le 30 Septembre prochain, l’Europe aura la possibilité d’interdire une technique de pêche qui menace les écosystèmes marins et les pêcheurs artisans : la senne démersale, aussi appelée senne danoise ou senne écossaise. A cette occasion, les pêcheurs artisans, la société civile et les membres de Pleine Mer sont fortement mobilisés, afin d’en finir avec cette méthode de pêche.
Mais qu’est-ce que la senne démersale ? Cette technique de pêche consiste à déployer deux câbles sur le fond de la mer. Au bout de ces deux câbles se situe un filet de type chalut. Lorsque les câbles sont rabattus, leur frottement sur le fond de la mer provoque la formation d’un écran sonore et d’un écran de sédiments. C’est cet écran vibratoire qui empêche les poissons de s’échapper et les rabat vers le chalut, qui est ensuite remonté à bord. Pour comprendre ce mécanisme, nous vous invitons à regarder cette vidéo de quelques secondes.
Selon les industriels, cette technique serait écologique. En effet, elle consomme moins de carburant qu’un chalut classique, et le poisson est de meilleure qualité que le poisson de chalut (Ifremer, 2010). Mais, comme l’explique Charles Braine, président de Pleine Mer “la senne démersale est spécialisée dans les espèces qui ne sont pas soumises à des quotas : rouget, seiche, grondin, calamar. Il n’y a donc pas de véritable suivi scientifique de ces espèces, qui sont chaque jour pêchées par dizaines de tonnes, par des bateaux mesurant entre 20 et 40 mètres. Ces dernières années, suite à l’interdiction de la pêche électrique, les industriels néerlandais ont fortement développé leurs flottes de senneurs, et certains pêcheurs français s’y sont mis, du fait de la raréfaction des ressources.”
Le problème, c’est que cette technique est terriblement efficace : en une action de pêche, un senneur couvre en moyenne 3km2 de fonds marins. Comme l’expliquent nos collègues de l’association Bloom “Cinq senneurs ratissent en une seule journée une surface équivalente à celle de Paris !”. Or il y a 75 senneurs actuellement autorisés à pêcher en Manche.
Autant dire que la Manche est en train d’être vidée de ses ressources, et que les pêcheurs artisans du Nord de la France, sont eux aussi une espèce en voie de disparition. Selon leur témoignage “Quand on pêche après un senneur, il n’y a plus rien à pêcher. C’est comme si un aspirateur à poissons était passé par là. En quelques années, cette technique de pêche s’est développée, et certaines espèces que nous avions l’habitude de retrouver dans nos filets ont aujourd’hui quasiment disparu de nos zones de pêche”. Selon une étude du Comité Régional des Pêches de Normandie et de l’OP Normandie, sur plus de 200 navires participants, 98% des équipages se disent pour un moratoire complet sur la senne démersale en Manche.
Heureusement, il y a un espoir et cette situation dramatique pourrait bientôt s’arrêter. Des négociations sont actuellement ouvertes au niveau européen pour interdire la senne démersale, grâce à un amendement voté par le parlement européen en juillet dernier. Ces négociations entre la Commission Européenne, le Parlement européen, et le conseil des Etats membres se termineront le 29 Septembre prochain.
Comme souvent, la France soutient les pêcheurs industriels, et n’a que faire de l’avis des pêcheurs artisans. En effet, le gouvernement suit la position du Comité National des Pêches Maritimes et des Elevages Marins (CNPMEM). Son président, Olivier Le Nezet, ne semble pas faire grand cas des pêcheurs artisans des Hauts-de-France et de Normandie. Pourtant, la senne démersale est bien interdite dans les 12 miles des eaux bretonnes, et Olivier Le Nezet est aussi le président du Comité Régional des Pêches et des Elevages Marins de Bretagne. Mais les collusions entre pêcheurs semi-industriels et représentants des pêcheurs ne sont un secret pour personne, et c’est ce qui a permis le développement de la senne démersale dans les eaux françaises, alors que les pêcheurs artisans s’y sont toujours opposés.
Tout va donc se jouer dans le rapport de force. Si nous montrons à la France et aux Etats membres de l’UE que les pêcheurs artisans et les citoyens sont largement unis dans ce combat contre la senne démersale, il est possible de gagner. Une pétition a été mise en ligne par nos collègues de BLOOM, qui travaillent chaque jour d’arrache pieds pour convaincre les décideurs européens d’interdire la senne démersale. Nous vous invitons à signer cette pétition, et à relayer massivement notre combat.
Contacts presse :
Charles Braine, président de Pleine Mer : 06 83 49 20 92
Thibault Josse, coordinateur de Pleine Mer : 06 29 10 47 76
Photo de couverture de l’article : BLOOM
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