Communiqué de presse  : TAC et Quotas 2025 – La petite pêche durable au bord du gouffre

Communiqué de presse : TAC et Quotas 2025 – La petite pêche durable au bord du gouffre

Les crises s’accumulent et la survie de la petite pêche côtière est en danger.

Les stocks de bars, de chinchards, maintenant de lieux jaunes et certainement de maquereaux sont en tension et les grands perdants risquent d’être encore une fois les petites unités de pêche polyvalentes, pourtant les plus vertueuses.

Cette semaine se déroule comme tous les ans le marathon des négociations autour de la fixation des TAC (totaux admissibles de capture) et quotas des espèces commerciales européennes. 

Pour la petite pêche côtière l’enjeu est de pouvoir continuer à travailler. Les navires qui la composent sont réglementairement limités en rayon d’action et sont donc ultra dépendants d’un territoire restreint. La polyvalence n’est pas une option, elle est la voie de salut pour pouvoir travailler « un peu de tout » tout au long de l’année. Cette dépendance territoriale impose de pouvoir prendre soin de l’écosystème proche et de ne pas mettre à mal les stocks côtiers pour pouvoir continuer à pêcher d’année en année.

Nous regardons donc vers Bruxelles pour la fixation de ces TAC et quotas mais également vers Paris pour connaître en début d’année les répartitions nationales des quotas français.

Il y a maintenant plus de 10 ans, lors de la dernière réforme de la Politique Commune de la pêche européenne (PCP), une nouvelle disposition a été inscrite dans les textes européens. Ce fameux article 17 de la PCP stipule que les États membres doivent mettre en place des critères objectifs sociaux, économiques et environnementaux dans l’attribution des droits et quotas de pêche. Malgré cela, la France est restée sur son principe historique des antériorités. Plus un navire a pêché par le passé (il y a des années de référence), plus sa part du gâteau est élevée. 

Malgré une procédure judiciaire qui a mis l’État français a défaut (sur la répartition des quotas de thon rouge de 2017), la politique reste la même. Le temps judiciaire étant long par nature, si rien ne change, nous gagnerons de nombreuses procédures à l’avenir mais la petite pêche côtière aura en grande partie disparu entre-temps.

Pour 2025, nous demandons à l’État français de changer de politique et de s’intéresser aux communautés littorales, à la fameuse souveraineté alimentaire et à celles et ceux qui pêchent en minimisant les impacts environnementaux, maximisant la valorisation et générant le maximum d’emplois au regard du ressource naturelle limitée par nature.

Un exemple parmi d’autres, le stock européen de chinchards a été décimé par les flottes industrielles de pêche minotière (qui transforment le poisson en farine et huile pour nourrir saumons d’élevage, poulets et cochons industriels…). L’Union européenne et la France pourraient, si le TAC est rouvert après deux ans de moratoire, concéder à minima 50% du quota aux navires de pêche côtière (fileyeurs, ligneurs et chalutiers) qui eux le valoriseraient en frais à destination de l’alimentation humaine.

Le thon rouge, le thon blanc, le chinchard et le maquereau sont ultra majoritairement la « propriété » d’armements de pêche industrielle ou semi industrielle qui exportent l’immense majorité de leurs captures, qui emploient peu au regard du volume de capture et qui ne participent que très peu à l’activité économique du littoral. 

Le lieu jaune et le bar (malgré un plan de gestion pour ce dernier) sont dans une situation préoccupante. Ils sont la principale source de revenus pour de nombreuses petites unités côtières, notamment les ligneurs. Il serait inconcevable de ne pas les préserver. Il est donc nécessaire qu’ils soient prioritaires dans l’accès à cette ressource sous peine de faillites dans le cas contraire.

On assiste a un effet pervers dans cette crise, les navires hauturiers ou semi industriels sont également en forte tension à cause d’un état très dégradé de la ressource (merlu, lotte, merlan…). Les décisions des politiques et d’une partie de l’interprofession vont dans le sens de les maintenir “quoi qu’il en coûte” en leur permettant de se diversifier aux dépends de la petite pêche côtière (bolincheurs sur des espèces pour lesquelles ils n’ont pas été créés et/ou des zones où ils n’allaient pas ou peu, arrêt potentiel du moratoire sur le bar en hiver pour les chalutiers….). Il s’agit de mesures irresponsables qui condamneront à court terme les deux flottes côtières et hauturières.

Fabrice Loher, l’éphémère ministre des Pêches du gouvernement Barnier a réussi le double exploit de se trouver mêlé à une sulfureuse affaire d’investissement dans un port de pêche omanais et surtout de permettre un échange ahurissant de quotas avec la Pologne afin que le plus grand chalutier du monde soit affrété par la Compagnie des pêches de St Malo pour pêcher du merlan bleu en quantité pour faire du surimi, symbole d’une alimentation ultra transformée héritée du XXème siècle.  Nous appelons le prochain ministre et le directeur des pêches du ministère à être aussi « transgressifs » en changeant enfin de politique pour permettre la survie de la petite pêche côtière et pour engager une réelle transition afin que la pêche française sorte du cycle de crises qu’elle connaît depuis des décennies.

« La logique industrielle qui a généré les faibles abondances des stocks et par effet de la logique des « antériorités », cette situation de rente où les gros captent la majorité des quotas d’espèces qui pourraient être pêchées à la côte par des petites unités, est en train de condamner la petite pêche côtière. À l’heure où la souveraineté alimentaire, le maintien des emplois et la « transition écologique » sont dans toutes les bouches des politiques, il est temps que cela se traduise en actes. Il en va de la survie de la petite pêche côtière. » déclare Charles Braine, porte-parole de l’association Pleine Mer.

Contacts presse :

4 commentaires :

  1. Guimard dit :

    J’espère que vous serez entendus. Pour ce que ça vaut, vous avez tout mon soutien.

  2. Philippe CADAS dit :

    et quid des pêcheurs du dimanche qui n’ont plus rien pêcher?

  3. cazadis laurence dit :

    Ce communiqué est tout ce qu’il y a de plus juste…

    Concernant le chinchard, en effet, il est pêché en quantité par les petites unités artisanales (probablement par les plus gros aussi) mais dans la mesure où sa commercialisation est interdite, il est donc remis à l’eau…la plupart du temps mort…et ça laisse songeur quant à l’efficacité de la protection de ses stocks…
    Il en est de même pour bien d’autres espèces, qui même si elles sont autorisées, sont si peu valorisées à l’achat – l’intérêt économique prévalant sur l’intérêt et la valeur alimentaire et nourricière – sont elles aussi rejetées sans pour autant figurer dans les déclarations de capture…
    Alors se pose aussi la question de la validité des données qui en découlent pour l’évaluation des stocks…et en allant un peu plus loin, les déclarations de capture sont-elles vraiment destinées à la préservation des ressources par la gestion des « stocks »…??
    Laurence Cazadis – Marin-Pêcheur

  4. cazadis laurence dit :

    Et pour en revenir aux quotas, à leur principe même et à leur fonctionnement…

    Sans porter atteinte au travail des scientifiques qui sont partie intégrante dans leur détermination via les éléments qu’ils transmettent quant aux ressources,

    Il semble évident, que dès le départ et avant même la répartition et la distribution des quotas, la base est faussée,

    Le seul intérêt des quotas est sensé être la préservation de la ressource et sa juste utilisation à l’alimentation humaine,

    Le principe d’antériorité encourage seulement et pousse d’une certaine manière à la surpêche, notamment pour les petites unités, et tout simplement pour pouvoir pérenniser son activité et à en vivre l’année suivante…

    Cela favorise aussi et ainsi le désintérêt vis à vis d’autres espèces présentant un moindre intérêt économique mais pourtant tout aussi valables dans un simple objectif d’alimentation humaine,

    Ainsi, les quotas contribuent d’une certaine facon à maintenir la pression sur les espèces qui y sont soumises – par l’usage du principe d’antériorité,

    Mais en effet, Ils favorisent la gestion d’un marché économique et entretiennent un fonctionnement selon la loi de la demande qui ne peut raisonnablement pas être appliquée à la pêche

    Tout cela pourrait avoir un impact moins préjudiciable et plus vertueux si une valorisation plus harmonieuse de l’intégralité des espèces était appliquée et pratiquée,

    Et on en reviendrait donc simplement à la gestion et la préservation de la ressource alimentaire destinée à l’humain,
    Sans prendre le risque de déséquilibrer davantage la chaîne alimentaire dont nous sommes un des maillons finaux…

    Tout cela demande à être creusé et développer encore… tant d’autres éléments y sont rattachés, concernés et impactés!!!
    Laurence Cazadis – Marin-Pêcheur

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